L’enfant-individu, l’enfant-adulte

L'enfant sauvage - François Truffaut - 1970

Certains jours, j’ai l’impression que Miette et Septpommes sont sept ou huit à courir derrière mon dos et presque autant à piailler dans la maison. Deux enfants déchaînés, ça fait nombre. 😉

Un peu trop livrés à eux-mêmes parce que je suis absorbée par différents écrits et quelques recherches, ils s’inventent des mondes depuis une semaine. Chacun se murmure à lui-même des histoires le matin avant de rejoindre l’autre pour des aventures périlleuses par-dessus, dessous les lits superposés.

Tout ceci serait très joli s’il n’y avait pas à la fin des cris, des larmes, des coups de pieds, des bassines renversées.

Enfant, j’exécrais la discipline, les devoirs. Quand j’atterrissais chez mes grands-parents, je savais que j’allais jouir d’une telle liberté d’action que toutes les aventures allaient m’être possibles. On pouvait m’appeler quinze fois pour passer à table, je ne sortais pas facilement de mes personnages. Je finissais mes plats avec mes doigts, sautais partout, courais du matin au soir dans des jeux plus ou moins inédits. C’était le paradis.

Naïvement, j’ai cru que Septpommes et Miette apprécieraient une liberté semblable pendant que je travaillais, une liberté de « presque » grand, mais mes enfants n’aiment pas.

Sans rire.

Ce qu’ils aiment, selon leurs dires après une grosse de nos disputes, c’est que je m’occupe d’eux, que je contrôle leurs activités, pas que je les laisse faire ce qu’ils veulent tout le temps car ils finissent toujours par faire des bêtises et se sentir abandonnés.

Sans rire (bis).

N’ont-ils pas pour autant besoin de liberté ? Si. Mais de liberté surveillée. Surveillée tendrement.

Miette vous expliquerait certainement ceci mieux que moi tant elle m’a fait un long discours après avoir versé de grosses larmes de crocodile joufflu.

Il fut un temps où je déplorais le fait que trop peu d’adultes considéraient les enfants comme des individus, et ce dès les premiers mois de leur vie. Puis, j’ai rencontré une nouvelle vague de parents. La quarantaine non assumée, le portable greffé à l’oreille,  ces parents « djeuns » jamais dispo n’avaient aucun scrupule à laisser leurs enfants à peine âgés de 5 ou 6 ans  livrés à eux-mêmes car, à défaut de les traiter comme des adultes, ils les considéraient déjà comme des ados. Et les ados savent très bien occuper leur temps loin de leurs parents, n’est-ce pas ? 😉

Je n’ai pas fait mieux la semaine dernière.

Je trouve insolents ces enfants grandis trop vite qui peuplent la cour de Septpommes alors qu’ils n’ont au fond que 7 ans. J’ai un mal de chien à supporter leur ton, leurs regards. Pourtant, sous leurs vêtements dernier cri, leurs jeux high-tech, leur maturité apparente, il me semble que le petit enfant en eux est toujours en quête de sécurité, d’approbation, d’écoute, de guide, de besoins simples.

Pas forcément de grande liberté.

Combien de fois, finalement, en voulant traiter nos enfants en individus, ne finit-on pas par les traiter en adultes ?